Clara Ysé, c’est, d’emblée, une voix. Une voix qui soulève le sable, traverse le feu, transperce la nuit, franchit en souveraine des continents de sentiments. Avec Oceano Nox, son premier album alliant une orchestration audacieuse de cordes, chœurs, cuivres, à des synthés et des textures plus électroniques, Clara Ysé s’avance en pleine lumière, à pleine puissance.
Ce premier album n’est pas celui d’une souffrante, il est même tout l’inverse : celui d’une désirante, d’une « obsessionnelle de la réparation », dit-elle, qui a choisi la lumière jusqu’à s’en aveugler, l’étourdissement plutôt que la langueur ténébreuse, la vie voluptueuse aux lisières de la transe au lieu de vivre à l’arrêt. Elle aime les novateurs, de Rosalia à Kendrick Lamar, les chanteuses envouteuses comme Lole Montoya ou Mercedes Sosa, autant que la musique baroque et la liturgie extatique des chants grégoriens. Elle confronte sa voix classique, évoquant tour à tour Barbara et Anne Sylvestre, à une modernité jamais artificielle ni opportuniste, par goût de transgresser et de tromper la sagesse.
Vulnérable mais puissante, solide comme le granit et pourtant insaisissable, elle pénètre dans la chanson française avec l’éclat et la classe des grandes conquérantes. Ne pas la suivre sera difficilement résistible.