Tchaïka

Librement inspiré de La Mouette d’Anton Tchekhov.

Que reste-t-il d’une artiste lorsqu’elle dit adieu à son art ?

Une vieille actrice au crépuscule de sa vie reprend du service pour un ultime lever de rideau.

Sur un plateau en clair-obscur, une comédienne et une marionnette grandeur nature s’unissent pour se promener librement dans l’univers de La Mouette de Tchekhov. Tchaïka, actrice vieillissante à la mémoire fuyante, se découvre soudain sur scène. Derrière elle, une jeune fille lui rappelle pourquoi elle est là : interpréter Arkadina lors de ses adieux à la scène dans sa pièce favorite du grand auteur russe. Mais le décor, comme le texte et les autres personnages lui échappent. Vaille que vaille, elle tente de dépasser la confusion qui lui fait confondre la pièce avec sa propre réalité.

Par cette vertigineuse mise en abyme, la comédienne et son double manipulé – Tchaïka signifie « mouette » en russe – confrontent les générations et alternent les va-et-vient, dans le passé avant de revenir à la trame de la pièce. Choisir de poursuivre ou abandonner, renoncer à incarner la jeune Nina c’est le choix auquel Tchaïka doit se résoudre. A travers la douce mélancolie de l’atmosphère et la précision de l’évocation, Tita Iacobelli et Natacha Belova élèvent l’art de la marionnette au rang de bouleversante performance.

 

De tout ce qui précède, on peut sans aucun doute déduire que Tchaïka est un grand spectacle: c’est à la fois une leçon d’écriture, de jeu et de manipulation, et une oeuvre profondément bouleversante. On peut même suggérer que cette pièce fera date, et deviendra une référence à l’avenir. Elle est du calibre des spectacles qui marquent une génération de spectateurs et d’artistes, qui créent un exemple qui s’approche tellement de l’idéal qu’il finit par pouvoir se confondre avec lui. Mathieu Dochtermann, T. La Culture 26 sept. 2019.